Un Guinéen nommé Sékou Touré

Dakar la belle, Dakar capitale du pays de la teranga – entendez par là du pays de l’hospitalité! Cinq jours que j’y suis et cinq jours que je m’y plais. L’équipe qui nous a accueilli ici des mon aéroport et s’occupe des blogueurs venus des quatre coins du monde n’a rien a envié au surnom du pays. Mais revenons-en à nos sujets politiques habituels. Ces derniers jours ont a beaucoup parlé politique. Est-ce étonnant avec tous ces esprits talentueux épris d’écriture qui sont réunis ici ? Surement pas. Durant les présentations d’usage, j’ai rapidement remarqué que mon aspect guinéen fascinait certains. En fait, ils étaient plutôt pleins de louanges pour le premier président de mon pays : Ahmed Sékou Touré. Ancien dictateur, son histoire serait elle si méconnue ? Sinon pourquoi tant d’admirations pour lui ?

Son NON à la France en 1958 scella le destin de la Guinée pour les années à venir. Exclu par Paris de son cercle d’influence, il faut rappeler que très souvent la France n’hésita pas à compliquer la tâche de son gouvernement à ses débuts. Ainsi, Conakry rejoignit le giron de l’Union Soviétique et répliqua le modèle de cette dernière. Cette expérience lui fut fort préjudiciable autant au niveau de ses pratiques administratives violentes, non démocratiques et injustes que de ses pratiques économiques qui furent désastreuses pour le tissu économique du pays.

Il est important de connaitre l’histoire, de ne pas l’occulter de ses faits les plus sombres, pour juger un homme et son action. Sékou Touré fut surement l’un des dirigeants africains les plus importants de son époque, mais beaucoup oublient qu’il fut aussi un personnage à l’action très contestée.

On  perd souvent  de vue que Sékou Touré fut, tout simplement, pour son peuple un dictateur à la main de fer. À l’époque de la première république guinéenne, le mot démocratie était étranger dans le langage commun. La liberté d’expression était inexistante, la justice un simulacre qui n’avait rien à envier aux moments les plus sombres du stalinisme et l’on pouvait croupir indéfiniment en prison pour un oui ou pour un non. Le vice fut poussé si loin que la terrible prison du camp boiro, où des milliers de Guinéens furent torturés, porta le surnom du Goulag des tropiques. La culture de la dénonciation atteignit des sommets indescriptibles durant la période. Les présumés complots racistes, politiques et économiques  contre l’État guinéen se succédèrent sous Sékou Touré.  Il purgea le pays de ses élites intellectuelles et constructives. De nombreux Guinéens qui auraient pu participer à la bonne construction du pays durent émigrer loin de leur mère patrie pour préserver leur vie.

Au niveau des faits honorables qui lui sont attribuables, on peut sans nul doute affirmer qu’il fut l’un des apôtres de la décolonisation africaine. À son époque, tel un kouamé Nkourouma ou un Habib Bourguiba, il était l’un des grands représentants du  droit des peuples à s’autodéterminer. La Guinée était un pays respecté – du moins diplomatiquement – dont la voix comptait en Afrique et parfois même dans le monde. Le pays participa a de nombreux combats révolutionnaires à travers le monde pour aider des peuples « amis » à recouvrir leur liberté. Mais, pendant que la nation brillait à l’extérieur, elle sombrait à l’intérieur. Près de 30 après la mort du premier président guinéen, quel héritage a-t-il laissé à ses concitoyens?

Pour y répondre on peut simplement constater que sous les 26 ans de règne du dictateur, le niveau de vie des Guinéens à fortement baissé. Encore aujourd’hui, la Guinée se trouve au 169 rang (estimations 2010) des pays en terme de PIB/habitant. Ahmed Sékou Touré a bafoué les bases de la démocratie en Guinée et ses successeurs n’ont pour l’instant pas non plus fait grand-chose pour sortir le pays de la torpeur dans laquelle il s’est installé Alors pour ceux qui  jurent souvent par Sékou Touré, n’oubliez pas que ce fut une figure histoire très controversée avec sa part de crimes et de responsabilités dans la situation désastreuse actuelle guinéenne.