De Kiev à l’Arctique

24 septembre 2014

De Kiev à l’Arctique

Président russe à la chasse Cc wikimedia
Président russe à la chasse Cc wikimedia

Il existe en ce moment dans le monde de nombreuses zones de conflits. Depuis 2011, la guerre en Syrie a fait des centaines de milliers de morts. Récemment, Israël était encore aux prises avec les Palestiniens de Gaza. Au plus fort des combats en Centrafrique, on croyait à une partition définitive du pays entre musulmans et chrétiens. Ne parlons pas des actes terroristes qui n’en finissent plus dans le nord du Nigeria. Cependant à regarder de près les activités diplomatiques du Canada, le pays a, ces derniers mois, déployé des efforts intenses sur un autre champ de bataille… l’Ukraine !

Depuis les premières échauffourées sur la place Maïdan de Kiev en novembre 2013, le Canada n’a cessé d’apporter son soutien au camp « anti » russe. Du ministre des Affaires étrangères au premier ministre canadien lui-même tout en passant par des déclarations internationales et des projets de sanctions contre Moscou, le gouvernement à Ottawa ne s’est pas économisé pour soutenir son allié ukrainien.

Pourtant, la question à se poser est la suivante : pourquoi le pays de l’unifolié s’engage à ce point dans un conflit qui se déroule à des dizaines de milliers de kilomètres de ses frontières? En relations internationales ne dit-on pas que l’intérêt particulier est ce qui dicte la conduite des nations ?

Quand on y fait plus attention, on peut remarquer que l’un des principaux enjeux géostratégiques auquel fait face le Canada est le contrôle futur de la zone arctique. Le réchauffement climatique rend cette zone – essentielle pour la navigation maritime et riche en minerais – de plus en plus accessible. L’Arctique et ses possibles retombées économiques attisent la convoitise des nombreux pays qui l’entourent. Le Canada, les Etats-Unis, la Russie et d’autres pays européens commencent à y réclamer des droits territoriaux. Face à tous ces interlocuteurs, le Canada voit d’un mauvais œil la Russie qui est, probablement, la plus belliqueuse et qui pourrait tenter un passage en force pour préserver ses intérêts.

Ces dernières années, les actions posées par la Russie ne contribuent pas non plus à rassurer les pays qui s’intéressent à l’Arctique. En 2007, une expédition a planté le drapeau russe au fond de l’océan Arctique, sous le pôle Nord. Une première dans l’histoire!  Dans un autre registre plus musclé, les Russes multiplient les exercices militaires dans la région. De plus, les annonces de créations d’unités combattantes permanentes qui vont y stationner se succèdent.

L’implication du Canada dans le problème ukrainien ne semble donc pas purement « humanitaire ». Oui, face au risque de partition du pays qui paraît être téléguidée de l’extérieur du pays, Ottawa est solidaire du gouvernement de Kiev. Mais cette solidarité répond aux intérêts géostratégiques du gouvernement de Stephen harper. On est ici face à une interprétation du jeu des dominos. Si l’Ukraine tombe, le prochain domino pourrait bien être l’Arctique. Les Canadiens ont bien peur que si la Russie arrive à ses fins en Europe de l’Est, ils n’usent des mêmes tactiques pour s’emparer de manière unilatérale des territoires litigieux en Arctique.

l'Arctique Cc wikimedia
l’Arctique Cc wikimedia

En matière de politique internationale, la solidarité va très souvent de pair avec la promotion de ses propres intérêts. L’échiquier géostratégique ukrainien est un autre bel exemple de cet adage.

Le nouveau continent gelé sera l’une des zones vierges les plus disputées au 21e siècle. À travers le conflit ukrainien, les grandes puissances ont déjà commencé à avancer leurs pions.

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Commentaires

Serge
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Il faudra nous dire aussi quels sont les intérêts du Canada au Congo. J'ai lu ce billet , je l'ai trouvé convainquant, même si je trouve que ton opinion sur la Russie est quelque peu "contaminée". Si tu adoptes pour la politique étrangère du Canada un critère d'évaluation réaliste; pour la Russie, il me semble que tu restes assez porté sur un critère moral.
Sais-tu que les entreprises canadiennes ont beaucoup gagné avec les deux guerres du Congo?

Mathilde
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Point de vue très original. Ca change de ce qui peut se dire sur le sujet en ce moment!