L’Europe vote

28 mai 2014

L’Europe vote

Collège Stanislas, bureau de vote des Français à Montréal. Cc Daye Diallo
Collège Stanislas, bureau de vote des Français à Montréal. Cc Daye Diallo

Il est 12 heures ce samedi 24 mai 2014, devant le collège Stanislas de Montréal, la communauté française a rendez-vous pour élire ses conseillers consulaires et surtout, les députés qui la représenteront au Parlement européen. J’accompagne une amie française, enthousiaste de se prémunir de son droit de choisir les personnes qui auront une influence sur sa vie. Toujours devant le collège Stanislas, pas grand monde. À l’intérieur, la foule n’est pas non plus énorme. Deux jours plus tard, les chiffres confirmeront cette impression. Seulement 6, 48 % des personnes inscrites sur les listes électorales (donc 2 971 votants sur 45 851 personnes) de la ville se sont déplacées. Première déception, vu l’abstention, la politique est encore perdante et c’est bien dommage.

Deuxième déception à l’annonce des résultats dimanche en soirée. Dans la grande majorité des pays qui votaient, les formations politiques eurosceptiques ou, franchement, anti-européennes étaient en tête. Je ne suis bien évidemment pas Français, ni Européen, mais il est triste de voir percer sur ce continent les idées « nauséabondes » des partis d’extrême droite. Des partis qui rejettent certains échecs de l’Union sur des boucs émissaires. Pour eux, si l’Europe va mal aujourd’hui, c’est la faute aux immigrés. Si la croissance est en berne, c’est la faute à l’ouverture des frontières et à la chute des barrières douanières. Si la classe moyenne doit se serrer la ceinture, la faute revient aux Roumains ou aux métèques venus de l’autre côté de la Méditerranée pour abuser des aides sociales tout en volant les emplois des gens de « souche ». C’est à peine si ces politiciens de mauvais augure ne détournent pas la pensée célèbre de Jean Paul Sartre – voyant leur niveau de réflexion, connaissent-ils  au moins ce philosophe – « l’enfer c’est les autres ».

Oui, aujourd’hui, l’Europe ne va sans doute pas très bien, mais ce n’est pas non plus le continent en perdition que décrivent les prophètes de malheur. L’Europe a de nombreuses réussites à son actif que l’on devrait sans cesse rappeler. La liberté de voyager sans complications administratives dans l’espace Schengen, la stimulation des voyages étudiants grâce à Erasmus, la paix durable sur le continent et beaucoup d’autres sont reliées à cette Europe qui a largement contribué à améliorer la vie de ses populations.

Ne nous voilons pas la face non plus, l’Union doit apporter des rectificatifs à sa construction, mais les solutions pragmatiques passent par une meilleure Europe, une Europe plus forte, une Europe aux finances, à la politique, à l’armée et aux affaires étrangères plus harmonieuses et cohérentes avec le développement global des pays qui la composent. Imaginez les milliards que ces nations pourraient économiser en mutualisant leurs dépenses pour créer une armée européenne. Une telle armée serait plus efficace face aux défis du 21e siècle.

Cependant, à moins d’un revirement spectaculaire, ce n’est surement pas avec la classe politique actuelle que de tels projets verront le jour. Il est dommage de voir que, plutôt de concevoir grand, chacun – les politiciens – s’applique à conserver son petit pouvoir dans son coin en accusant les autres de ne pas jouer franc jeu. De plus, nombreux sont les politiques qui se fourvoient et ne se privent plus de rependre les thèses des partis extrémistes dans l’espoir de s’attirer quelques votes (par exemple, la droite qui se dit décomplexée en France).

Que de grandes réflexions, mais ce sera aux Européens de décider de leur avenir et de faire les choix qui détermineront leur place – grande ou timorée –  dans le concert des nations.

Revenons sur Montréal. Au moins chez nous, les Français auront barré la route aux partis extrémistes. Par exemple, la liste Bleu Marine – affiliée au FN français – n’aura obtenu que 313 votes sur les 2938 exprimés soit 10 ,65 % des suffrages. Étonnant cependant que des « immigrés » au Canada votent pour un parti anti-immigration dans leur pays.

Partagez

Commentaires

Serge
Répondre

Beau constat à la fin de ce billet.
Mais pour le début, je me demande pourquoi cette surprise sur la présence d'un pensée d'extreme droite en France et particulierement en Europe... Vous oubliez Vichy?
Et avant cela, lisez ou écouter Zeev Sternhell ici
https://www.rfi.fr/general/20100606-1-zeev-sternhell-professeur-emerite-histoire-idees/
ou là:
https://www.franceculture.fr/emission-repliques-le-fascisme-en-france-2013-05-11
Et au besoin, lire, Umberto Eco dans un texte politique sur le Protofascisme...
La France renferme en elle une pensée extrémiste qui apparaitra bientôt...
Le jour de gloire arrive ...

dayediallo
Répondre

La surprise n'est pas qu'il y ait une pensée d'extrême droite en France (La pensée politique d'extrême droite existe et y est structurée depuis plus d'un siècle) mais qu'un parti politique d'extrême droite remporte des élections (rappelons qu'à même qu'un électeur sur 2 n'a pas voté)... Ce qui est presqu'une première. Mais je crois en l'avenir et ne pense pas que l'extrême droite y arrivera au pouvoir un jour! Merci pour les liens intéressants à consulter.

Yanik
Répondre

Daye,
Je me permets d'apporter un précision quant à la montée des partis eurosceptiques que tu assimiles à des idées nauséabondes. Or, tous ne sont pas d'extrême droite. Le M5S en Italie, Podemos en Espagne, Syriza en Grèce (gauche radicale) sont des formations positionnées contre l'institution européenne (telle qu'elle existe aujourd'hui) sans avoir le moindre relent brunâtre. On peut être eurosceptique sans être un nationaliste en botte de cuir!
Enfin concernant le FN en France, le problème n'est pas au niveau des gens qui votent pour ce parti, il se situe au niveau de ceux qui ne vote pas ou plus. Les gens ne croient plus aux formations politiques traditionnelles et aujourd'hui seul ce sinistre parti parvient à mobiliser ses électeurs sur tous les scrutins.

dayediallo
Répondre

Tu as parfaitement raison on peut être eurosceptique sans être nationaliste. Mon article parle des partis anti-européens (qui font plus que de l'eurosceptisisme) et d'exrtême droite. Je ne parle pas des partis de gauche radicale car comme tu le dis ils sont contre l'institution européene telle qu'elle existe aujourd'Hui. Il veulent la réformer (ce qui ne serait pas une mauvaise chose) pour qu'elle soit à un meilleur service de ses citoyens. Donc la précision était dans l'article, mais je devrais surement mieux l'expliquer la prochaine fois. Porte toi bien mon ami !